LE POINT SUR LES NÉGOCIATIONS COLLECTIVES DE L’APASE – PUBLICATION DU RAPPORT DE LA COMMISSION DE L’INTÉRÊT PUBLIC

02 novembre 2012

En mars 2012, l’APASE a présenté au président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) une demande d’établissement d’une commission de l’intérêt public (CIP) afin d’aider à la médiation des points sur lesquels les négociations entre l’APASE et le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) avaient achoppées en janvier. La CIP a pour rôle de formuler des recommandations non exécutoires susceptibles d’aboutir à un règlement. Après la soumission de mémoires écrits, le 25 septembre, et des plaidoyers de vive voix, le 4 octobre, la CRTFP a communiqué le rapport du président de la CIP le 23 octobre 2012. Le rapport intégral peut être consulté (en anglais) http://www.pslrb-crtfp.gc.ca/decisions/fulltext/590-02-08_e.asp. L’APASE présente ci-dessous son analyse des recommandations et le stade où les négociations en sont actuellement rendues.

ÉTAT DE LA QUESTION

Dans notre dernier compte rendu sur les négociations, le 19 octobre, nous avons cerné les deux points principaux qui ont abouti à l’impasse dans les négociations en janvier et à la demande de l’APASE d’établir une CIP en mars : (1) les taux de rémunération et (2) l’élimination des dispositions relatives à l’indemnité de départ en cas de cessation d’emploi volontaire.

Pour ce qui est des taux de rémunération, la première priorité de l’APASE était l’anomalie qui persiste aux niveaux FS-02 et FS-04 (par rapport aux taux de rémunération CO-02 et EX-01 respectivement) depuis la mise en œuvre de la nouvelle Norme de classification FS en 2005. Il y a lieu de noter qu’une décision arbitrale rendue pour le groupe EC le 12 juillet aura pour effet d’exacerber cette anomalie, principalement au MAECI, et de faire en sorte que chaque niveau FS accuse un retard d’au moins un échelon de rémunération complet (3 000 $ ou plus) en comparaison de leurs homologues EC, à compter de 2013. L’employeur continue de soutenir que le groupe FS est adéquatement situé en comparaison des autres groupes et qu’il n’y a pas lieu de rajuster les taux de rémunération au-delà des augmentations économiques types.

Dans le cas de l’indemnité de départ, l’employeur vise à supprimer l’accumulation de crédits pouvant être utilisés en cas de retraite ou de démission. (L’indemnité de départ dans les cas de cessation d’emploi, mise en disponibilité ou décès serait maintenue.) Cette mesure réduirait effectivement notre rémunération de 2 % par année et, pourtant, l’employeur n’offre qu’une simple augmentation salariale forfaitaire de 0,75 % en contrepartie.

ANALYSE DES RECOMMANDATIONS

L’APASE est grandement désappointée de la recommandation du président de la CIP relative aux deux points principaux en litige et frustrée par le raisonnement invoqué. Sur le plan des augmentations économiques et de l’indemnité de départ :

« [22] la CIP recommande que les propositions de l’employeur en ce qui a trait aux taux de rémunération et à l’élimination de l’indemnité de départ soient adoptées dans le cadre de la nouvelle convention collective. Il est impossible d’en arriver à une autre recommandation que celle-ci… »

En formulant cette recommandation, le président de la CIP fait abstraction d’une observation antérieure dans son rapport :

« [13] LA CIP est d’avis qu’il convient de tenir compte de tous les facteurs énoncés à l’article 175 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique pour formuler ses recommandations dans cette affaire, et qu’aucune prépondérance ne doit être accordée à l’un ou l’autre de ces facteurs par rapport aux autres. En outre, chaque facteur doit être apprécié et appliqué en fonction des circonstances propres à chaque affaire soumise à une CIP, sur la base des mémoires, de la preuve et des arguments qui lui sont présentés. »

Les règlements types, en particulier lorsqu’ils sont pris isolément, ne sont pas un des facteurs énoncés à l’article 175 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Dans son mémoire, par ailleurs, l’APASE s’est appuyée, inter allia, sur l’Indice des grands règlements salariaux du secteur privé de RHDSC (le même indice utilisé pour calculer les augmentations salariales des députés) pour justifier les augmentations économiques qu’elle revendique. Cet indice prouve clairement que les augmentations salariales entre le 1er juillet 2011 et le 30 juin 2012 dépassaient en moyenne 2 %. Il semble que le président ait opté pour ne pas tenir compte de toute preuve contraire en jugeant qu’il était impossible d’en arriver à une autre recommandation que le règlement type.

Dans le cas des anomalies salariales que l’APASE a cernées par comparaison avec d’autres groupes au MAECI qui se voient assigner des tâches semblables à celles des agents FS, le président de la CIP recommande ce qui suit :

« [23] Par ailleurs, étant d’avis que les éléments de preuve présentés démontrent l’existence de certains écarts sur le plan des comparateurs internes visant les niveaux FS1 et FS2, la CIP recommande l’ajout d’un échelon supplémentaire à chacune des échelles salariales des niveaux FS1 et FS2 dès le début de la première année de la convention collective et avant l’application des augmentations économiques visées au paragraphe 22 du présent rapport. »

L’APASE est heureuse que le président reconnaisse que le travail FS est comparable au travail EC et CO – comparaison que le SCT, appuyé par le MAECI, nie constamment malgré toutes les preuves du contraire –, mais, dans son mémoire, elle a démontré que l’écart au niveau FS-02 correspond davantage à trois échelons et elle a fait valoir qu’elle a été empêchée d’aborder la question lors de la dernière ronde de négociations à cause de l’adoption d’une loi de restrictions salariales. L’acceptation de la recommandation de la CIP creuserait davantage l’écart entre les employés de niveau FS-02 et leurs homologues de niveaux EC-06 et CO-02 par rapport à ce qu’il était au début de la présente ronde de négociations (voir le graphique en annexe).

La recommandation visant le niveau FS-01, par ailleurs, révèle une incompréhension inquiétante des éléments de preuve de l’anomalie salariale présentés dans notre mémoire et mine la crédibilité du rapport dans son ensemble. La proposition d’ajouter un quatrième échelon à un programme de perfectionnement d’une durée de trois ans nous laisse extrêmement perplexes. La mise en œuvre d’une telle proposition serait inutile et gratuite.

Quant aux niveaux FS-03 et FS-04,

« La CIP recommande de ne pas restructurer les échelles salariales des niveaux FS3 et FS4. Il n’y avait aucun élément de preuve démontrant l’existence d’écarts sur le plan des comparateurs internes visant le niveau FS3 alors que les éléments de preuve soumis visant l’échelle FS4 étaient très limités et peu convaincants. »

L’APASE a porté à l’attention de la CIP la décision arbitrale portant sur le groupe EC – dont le président était le même que celui de notre CIP. Nous avons démontré que le travail exécuté par les membres du groupe EC à l’administration centrale du MAECI est essentiellement le même que celui qui est assigné aux agents FS à l’administration centrale du MAECI (position renforcée par le propre site web du MAECI) et fait remarquer que l’ajout d’un échelon et la suppression d’un échelon à chaque niveau auraient pour effet de donner au groupe EC un échelon complet de plus que les agents FS comparables. En dernière analyse, le président a opté pour ne pas tenir compte de sa décision antérieure.

Dans le cas particulier du niveau FS-04, l’APASE a rappelé que, lors de l’élaboration de la nouvelle Norme de classification FS en 2005, l’employeur avait insisté sur le fait que ce niveau servirait de carrière alternative au niveau EX-01. De fait, il était entendu par tous les intéressés que les employés de niveau FS-04 relèveraient de gestionnaires EX-02. Depuis la conversion, le maximum du niveau FS‑04 accuse du retard par rapport au maximum du niveau EX-01, au point où l’échelle de rémunération FS-04 a actuellement besoin d’être rajustée au-delà d’une seule et unique augmentation économique. Le négociateur du SCT a déclaré que le niveau FS-04 n’est pas un niveau équivalant à celui de EX-01 sans étayer cette affirmation autrement qu’en s’appuyant fallacieusement sur les taux de rémunération. Ici encore, le président semble s’être fié aveuglément à la position du négociateur du SCT.

Enfin, pour ce qui est du recrutement et de la rétention des employés, la CIP a fait observer que :

« … il ne semble par y avoir de problème particulier de recrutement ou de rétention des employés du groupe FS… »

Bien que nous ne remettions pas en cause la conclusion du président au sujet du recrutement, la preuve que nous avons soumise a démontré clairement qu’un problème de rétention des employés se pose continuellement à la 14e année de service, stade auquel seulement environ la moitié de la cohorte initiale de recrues reste au sein du groupe FS. Le SCT a reconnu l’exactitude de nos chiffres, mais il a fait valoir que ceux-ci ne prouvent pas l’existence d’un problème de rétention des employés.

GRAPHIQUE : COMPARAISON ENTRE LE GROUPE FS ET LES GROUPES COMPARATEURS

Le graphique suivant illustre l’ampleur du retard que le groupe FS accusera par rapport aux groupes comparateurs internes à l’administration centrale du MAECI d’ici 2014 si les recommandations de la CIP étaient intégralement adoptées.

GRAPHIQUE (cliquez ici) (PDF)

CONCLUSIONS

L’APASE rejette les principales recommandations du rapport de la CIP pour les motifs suivants :

  • Le président n’a pas appliqué rigoureusement les cinq facteurs principaux énoncés à l’article 175 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique dans l’évaluation de la preuve qui lui a été soumise. Plus précisément, il a fait état d’un règlement type fort controversé que d’autres agents négociateurs ont accepté comme constituant sui generis le plus important facteur à prendre en considération, sans évaluer le bien-fondé sous-jacent.
  • Le président n’a pas tenu compte dans son rapport de la preuve détaillée que l’APASE a soumise concernant les groupes comparateurs internes, les augmentations salariales dans la population active canadienne en général et la prévalence de l’indemnité de départ ailleurs dans les secteurs public et privé – preuve que le Conseil du Trésor s’est donné peu ou pas la peine de contredire dans ses propres présentations.
  • L’ajout par le président d’un quatrième échelon de rémunération dans un programme de perfectionnement d’une durée de trois ans fait douter de la compréhension fondamentale des enjeux de la part de la CIP et donne à entendre qu’elle n’a pas accordé à la preuve que l’APASE a soumise toute l’attention que celle-ci méritait.

L’APASE se déclare aussi profondément désappointée par les nombreuses positions non factuelles que le négociateur du SCT a avancées devant la CIP et par l’absence d’intervention des hauts fonctionnaires du MAECI et de CIC présents (y compris plusieurs agents du service extérieur de carrière) pour rétablir les faits :

  • La notion que le travail exécuté par les FS à l’administration centrale du MAECI n’est pas comparable au travail exécuté à l’administration centrale par le groupe CO ou le groupe EC à quelque niveau que ce soit est manifestement fausse. Non seulement le ministère traite-t-il les affectations FS, CO et EC comme parfaitement interchangeables, mais le propre portail web de carrières du MAECI et ses descriptions de travail internes révèlent un chevauchement massif de tâches entre ces groupes.
  • La notion que les agents FS qui travaillent à la Direction des services juridiques ne sont pas tenus de donner d’avis ou de conseils juridiques – qu’il s’agit d’une « simple affectation comme les autres » au sein du groupe FS – est abaissante pour ces professionnels juridiques hautement qualifiés qui sont expressément recrutés pour ce poste et dont les droits d’exercice de la profession sont payés par le ministère pour la durée de leur affectation à cette direction. La position du SCT va aussi à l’encontre de l’article 10 de la Loi sur le MAECI qui confère officiellement aux avocats du ministère les pouvoirs en matière de questions juridiques et de négociations internationales.
  • La notion insultante que les agents d’immigration FS à CIC exécutent du travail comparable à celui des postes de niveaux PM-02 et PM-04 et qu’ils sont « déjà surpayés » est si loin de la réalité et des équivalences depuis longtemps établies qu’elle ne mérite aucun autre commentaire.

Bref, l’APASE estime que :

  1. le Conseil du Trésor – soit par ignorance, soit à dessein – sous-estime outrageusement les services professionnels que les agents FS fournissent au gouvernement; et que
  2. le MAECI et CIC – soit par collusion intentionnelle, soit par manque d’effort – refusent continuellement d’appuyer une représentation exacte du travail FS dans le cadre du processus de négociation collective.

Si on permet à cette tactique de réussir, les incitatifs au travail FS seront gravement compromis et la durabilité du groupe FS – en particulier la rétention des employés à mi-carrière au-delà de la 14e année de service – sera gravement menacée lorsqu’ils exploreront des débouchés au sein de groupes comparateurs internes et externes.

LES PROCHAINES ÉTAPES

Le sous-comité de négociation de l’APASE évalue actuellement les incidences du rapport de la CIP sur notre position de négociation avant la reprise officielle des pourparlers avec le Conseil du Trésor dans les semaines qui viennent, en vue d’établir s’il est possible d’en arriver à une entente à la table.

Dans l’intervalle, l’APASE tiendra des séances d’information avec ses membres à l’administration centrale du MAECI et de CIC pour répondre aux questions sur les recommandations de la CIP et discuter de la stratégie de négociation que nous devrions adopter. Dans le cas de ceux et celles qui sont dans les missions à l’étranger, nous les tiendrons au courant par voie électronique (y compris des téléconférences ou vidéoconférences à l’occasion, si possible) et au moyen de rencontres avec des membres du Comité exécutif lorsqu’ils seront appelés à se rendre sur place pour d’autres affaires. Nous invitons aussi les membres à communiquer avec le bureau national pour nous faire part de leurs questions, observations ou préoccupations.

Nous n’avons pas encore établi s’il y a lieu d’entreprendre des préparatifs en vue d’un vote de grève, mais l’APASE a rédigé un feuillet d’information sur les étapes et l’échéancier de moyens de pression au travail afin de répondre aux questions de ses membres. Veuillez consulter le site web de l’APASE à https://www.pafso.com/news_releases_fr.php?newsID=143 pour prendre connaissances des exigences législatives et des incidences de moyens de pression au travail pour les DSE et les autres conditions de service.